Avant course :
Je passe sur les heures d'entraînement accumulées, pas
toujours séduisantes mais indispensables pour arriver à un résultat.
La dernière semaine, pour m'affûter un peu plus, je mange
peu et surtout des protéines les premiers jours, avant de charger en sucres
lents à partir du jeudi soir. Le pont de l'Ascension me permet de me reposer mais je ressens
quelques faiblesses qui font que j'ai des doutes sur ma stratégie alimentaire.
Un petit footing à jeun le samedi en rajoute une couche.
Arrivé à Cucugnan vers midi, je ne retrouve pas l'apéro et
les grillades de l'an dernier, les organisateurs sont sur le terrain. Je me
rabats donc sur un hamburger frites ketchup pour être fort le lendemain.
L'après-midi se déroule tranquillement, je file un petit coup
de main à l'orga, j'enchaîne avec une mini sieste et retrouve peu à peu potes
et connaissances qui arrivent.
La météo étant pourrie, la pasta est servie à l'intérieur
après l'apéro offert, juste un Ricard pour moi, demain j'ai course. Les pâtes
sont proposées avec plusieurs accompagnements, c'est copieux, très bon et
sympathique. A des années lumières de ce que proposent certaines organisations
professionnelles axées sur le profit.
Le temps de discuter encore un peu et c'est parti pour une
bonne nuit dans la 306 camping-car.
Réveillé avant la sonnerie, je prends mon petit dej vers 5h,
avant de me rendormir un peu. Je me prépare ensuite avant de faire un tour vers
les inscriptions. Il ne fait pas froid, mais le ciel est très nuageux, les
crêtes environnantes un peu embrumées et le risque de pluie bien présent. Je
pars avec un manche longues technique et le coupe-vent, puis juste le porte
bidon et de quoi grignoter, en mode stratégie légère.
Prêts ! |
Des promesses, qu'il faut tenir...
Tirage au sort avant le départ, je gagne une paire de Hoka !
A 7h30, le départ est donné au coup de fusil. Pas de round
d'observation même pendant le tour du village, les futurs premiers sont partis
très vite. Je suis 9ème, calé dans mon objectif top10. J'aborde la
première montée vers le col en force, passant un coureur avec un barbelé tatoué
sur toute la longueur de la jambe. Mais je ne suis pas à l'aise dans la grosse
descente qui suit, alors que "le barbelé" dévale comme un fou suivi
par plusieurs autres qui me dépassent également.
Sur la piste qui suit, je reviens sur eux et hormis "le
barbelé", je connais tout le monde : Avelino Alves Lima, très bon coureur
avec un record à 2h37 au marathon, Eric Groy, Benoit Phalippou, Christian
Lambert, le top10 est là, à un bon rythme, alors que les premiers ont disparu
devant depuis longtemps. On aborde ensuite la montée au-dessus des gorges,
relativement facile, mais les rochers rendus glissants par la pluie de la nuit
sont piégeux. On enchaine sur une nouvelle piste où l'on dépasse le copain des
deux premiers, sans doute parti trop vite.
Passé le Col de la Croix dessus, je bascule dans la descente
à la suite de Christian. Le sentier est bien dégagé, il faut rester vigilant
mais on descend très bien, pas de perte de temps ici, un plaisir de descendre à
fond. On rejoint Avelino, qui me le confirmera après la course, descend plutôt mal.
Notre groupe se reforme donc sur la piste des Moulins quand
d'un seul coup je me sens vraiment très bien. Je passe donc devant et
j'accélère, imprimant mon rythme, espérant aussi faire exploser le groupe si
c'est possible. Au petit pont, je fonce sur le monotrace sans me retourner,
j'entends juste un coureur juste derrière moi. Je ne le sais pas à ce moment-là,
mais je suis quatrième ! Arrivés en vue de Rouffiac, Avelino passe devant et me distance
légèrement. Je m'arrête au ravito remplir le bidon alors qu'il poursuit.
"Le barbelé" passe aussi sans s'arrêter et je repars un peu après
lui. Les autres ont bien été distancés.
A la sortie du village, j'attaque le premier monument de la
course, l'énorme montée vers le château de Peyrepertuse. Le début est
progressif puis le sentier devient de plus en plus raide au milieu des bois.
J'aperçois le maillot blanc de mon prédécesseur et peu à peu je comble mon
retard. Je le rejoins, le dépasse et j'arrive à prendre un peu d'avance dans
cette montée rendue glissante où il faut parfois s'accrocher aux arbres pour ne
pas reculer. Je sors bientôt du bois et j'arrive sous les murailles du château
par les marches taillées dans la pierre. Une bénévole m'indique l'entrée dans
les vieilles murailles afin d'aller pointer à l'intérieur. Pas le temps
d'admirer l'architecture du lieu, je repars en sens inverse, croisant "le
barbelé" qui arrive. Il me rejoint très vite dans la descente à risques,
entre marches et roches glissantes, et me laisse sur place bondissant d'un
obstacle à l'autre.
J'atteins le parking où il n'y a pas le point d'eau annoncé (à moins
qu'il n'ait été caché dans le C15 stationné là ?), poursuis la descente par un
joli sentier en lacets puis par une portion de route. J'aperçois "le
barbelé" sur la piste, en très peu de distance il m'a pris quasiment une
minute. La portion qui suit a peu d'intérêt, une piste vallonnée où il faut
tenir le rythme et trouver les meilleurs passages pour éviter une boue
collante. C'est ainsi qu'après 2h de course
j'arrive au ravito des Cols où je refais le plein du bidon en mangeant
une paire de Tucs. Quelques mots échangés avec les bénévoles, bien sympas ici
comme tout le long, et j'attaque une nouvelle montée en direction des crêtes.
Bien plus progressive que la précédente, j'arrive à alterner course et
marche, motivé par le maillot blanc du "barbelé" que j'aperçois.
Apparemment les montées ne sont pas son point fort, alors que j'y suis toujours
plein de ressources. Je le rejoins donc sur le haut et me colle derrière lui
alors que l'on court sur le sentier du plateau. Ici le vent souffle et
j'apprécie buff autour du cou et coupe-vent. Je profite d'une nouvelle montée
pour le dépasser et c'est alors qu'il me demande si j'ai du papier hygiénique.
Esprit trail oblige, je lui passe la moitié du mien, tout en me disant que
grâce à son arrêt forcé je devrais le distancer pour de bon. Mais il poursuit
et me dépasse même dès que l'on aborde de nouvelles parties techniques. Puis
c'est un coureur que je n'attendais pas, un catalan de Diedre, qui passe
également et me laisse sur place.
Comme prévu, je sais que c'est sur cette partie remplie de rochers
glissants que je vais perdre pas mal de temps. Je fais, prudemment, ce que je
peux et j'avance dans de supers paysages que la brume peu épaisse laisse
apercevoir. J'en termine avec les rochers et plonge dans la descente de
"la piste de ski". C'est glissant, technique et casse gueule, entre
racines et petits rochers. Un copain s'ouvrira d'ailleurs la main ici après une
chute. Je continue donc sur la réserve, m'accrochant aux arbres quand il y en a,
relativement lent mais prudent. Forcément, je finis par être rejoint par un
coureur, en l'occurrence Eric Groy, au niveau des éboulis. Je le laisse passer et
le regarde dévaler la pente, rapidement distancé. En bas du mur, je rajoute un
peu d'eau au bidon et quitte les bénévoles, apercevant Benoit en approche sur la fin de la pente. Me voici
parti pour quelques kilomètres de piste, avec de temps en temps "le
barbelé" ou Eric en point de mire, motivé pour tenir Benoit à distance
alors que le haut des cuisses commence à devenir douloureux et que courir, vite
si possible, est moins simple. Je ne lâche rien et parviens enfin à la petite
descente.
Ma cheville qui se tord me donne l'occasion de m'émerveiller sur les
capacités du corps (entraîné) à rattraper une erreur et à continuer sans
problème. Puis c'est le ventre qui semble perturbé, mais je sais que c'est dû
aux secousses de la descente et que ça passera dès la montée qui arrive.
J'aperçois Christian loin au-dessus sur la piste, en retard de quelques
minutes, et me sachant 8ème à
cet instant, même si Benoit revient je devrais donc conserver le top10. C'est
ainsi que j'aborde l'énorme montée du Sentier Cathare en direction du château
de Quéribus. Mais dès la première haute marche du chemin, je ressens comme un
coup de poignard dans la cuisse gauche, douleur inconnue qui me cloue sur
place. Heureusement, cela s'estompe presque aussitôt et je peux m'engager dans
l'ascension. Je monte fort, toujours efficace sur ces parties, gardant un œil
sur Benoit qui remonte sur moi peu à peu, alors qu'une nouvelle fois j'ai
"le barbelé" en visu. C'est l'occasion de le doubler, ce qui arrive
assez vite, et de creuser un gros écart avant la crête technique d'après
château. Benoit le passe aussi, me rejoint et c'est ensemble que nous arrivons
au dernier ravito solide où nous retrouvons Flo et Francis, serre files du
18km.
Au pied du donjon de Quéribus. |
Nouveau remplissage de bidon en mangeant un tuc, 2 ou 3 rondelles de
saucisson prises en réserve et après une gorgée de Coca je poursuis la montée
vers le donjon, à la suite de Benoit. Je grimpe toujours bien, suivi de Flo
alors que Francis passe devant pour prendre quelques photos. Puis je les laisse
accompagner les derniers du 18km, dont une femme qui tombe devant moi, non
blessée mais qui met bien trente secondes à se relever en me barrant le
passage.
Je poursuis sur la crête, alternance de courtes descentes prudentes (Yvan est tombé et s'est blessé ici) et de montées où j'espère accroitre mon avance sur "le barbelé". |
"Le barbelé"
La crête est finalement assez courte et je bascule dans la descente,
essayant d'être efficace pour ne pas lâcher trop de secondes. Je la négocie
bien et arrive sur une nouvelle portion de piste où les cuisses commencent
vraiment à ne plus en vouloir. J'avance cependant mais ne voyant pas le maillot
blanc du "barbelé" au loin derrière, je me mets un peu en pilotage
automatique, déroulant la plupart du temps, relançant de temps en temps, mais
savourant déjà cette 8ème place. Je double quelques coureurs du
18km, on s'encourage mutuellement, c'est sympa. Au bas de la descente, je reprends
un peu d'eau au ravito avant d'aborder une légère montée, toujours confiant sur
le résultat.
Mais c'est en arrivant en haut que surprise, "le
barbelé" arrive juste derrière moi. Satisfaction pour lui sans doute et
électrochoc pour moi. Du coup je ne sens plus mes cuisses douloureuses et je me
lance à fond sur le monotrace qui nous mène au pied du dernier mur. On y arrive
ensemble mais je suis confiant dans cette énorme montée qui est ma dernière
chance de le distancer. Je l'attaque fort et rapidement j'entends le bruit de
sa respiration s'estomper derrière moi. Mais pas question de faiblir, je dois
prendre un maximum d'avance avant la dernière descente. Coup d'œil discret dans
le dernier lacet, j'ai environ trente secondes de sécurité sur lui. Je me lance
à fond sur le chemin, quelques pierres à éviter, quelques passages glissants,
mais ce n'est pas assez technique pour me ralentir. Je fonce jusqu'au bas avant
de remonter au niveau du cimetière.
Yvan est au-dessus et m'encourage, Maël
m'accompagne un peu, je jette un regard en arrière pour voir que je suis
définitivement assuré de cette place, le maillot blanc du "barbelé"
étant loin. Je finis avec eux deux puis plonge vers l'arrivée, terminant le
poing levé, extrêmement satisfait de ce top10 réussi et longuement préparé.
Et puis cerise sur le gâteau du top10, j'ai été appelé pour
le podium V1, car arrivé en troisième position. Après le tirage au sort pour les chaussures et le
Tshirt à l'inscription, me voici donc reparti de Cucugnan équipé des pieds à la
tête.
Il reste après cela une certitude, le Trail de Quéribus et
la Course des Seigneurs ( en y arrivant un minimum préparé) sont des courses
qu'il faut absolument avoir vécues, classées dans les toutes meilleures pour
les parcours comme pour l'ambiance.
A revivre encore.
***
A voir une très bonne vidéo qui retrace bien toutes les beautés et difficultés du parcours :
A revivre encore.
***
A voir une très bonne vidéo qui retrace bien toutes les beautés et difficultés du parcours :
9 commentaires:
Wahooo.....super reportage... Bravo tu as tenu bon pour le barbelé....lol....pour ton podium v1....biz
Félicitations...Tu as su parfaitement gérer ta course malgré la pression que tu t'étais mise par voie "d'affichage" !
A très bientôt sur les sentiers du Lot.
Objectif atteint. Le travail sérieux fini toujours par payer.
Pour la gestion de course je ne me faisais pas de soucis, on connait ton expérience sur le sujet.
Bravo pour ton objectif annoncé, ta super gestion de course,et ton magnifique récit...!! et motivé par du "barbelé" ça c'est à prendre en considération pour mes prochaines courses ;-) @+ BONNE RéCUP christian
1 superbe course et 1 super récit: comme d'hab! Bravo pour cette superbe course menée de "pieds" de maitre. Les courses de Cucugnan sont un vrai régal!
A bientôt pour partager de nouveaux sentiers!
marrant, j'étais aussi à la lutte avec le barbelé à Fontfroide, il descendait comme un dingue, s'est rétamé dans la pente ou tu t'es blessé à la main !
Bravo pour ta course et ton résultat !
Tu cours en Hoka toi ?
Non je cours en Brooks ou Asics. Je testerai les Hoka avec la paire gagnée.
@+
Bravo Michel
Je suis tout essoufflé à la lecture de ton CR
Récit palpitant, on s'y croirait
Yvan c'est fait mal ? il faut aller voir ça de plus prêt
Encore bravo et tu ne m’enlèvera pas de l'idée qu'il n'y a de la chance que pour la "canaille"
A+ Campeon
Belle course et récit agréable à relire un an et demi après...
On sait maintenant que le "barbelé" s'appelle François Pastor...
Enregistrer un commentaire