mardi 28 octobre 2008

- Les Templiers 2008


Le stand des Citadelles
























Comme en 2007, le salon s'est très bien passé : beaucoup de contacts chaleureux avec des coureurs qui aiment à se rappeler les éditions des Citadelles qu'ils ont courues ou avec d'autres intéressés par une venue prochaine sur l'épreuve.
Une bonne ambiance entre exposants, notamment avec Marc coordinateur du Challenge des Trails du Sud Ouest avec qui j ai partagé deux repas et des opinions similaires sur les dérives médiatico-financières de certaines épreuves. Un grand bonhomme, un passionné.





La Grande Course des Templiers
















Deuxième nuit à l'hôtel, tout aussi pauvre en sommeil : trois ou quatre heures par nuit. Sachant que des moments difficiles sont inévitables sur une longue épreuve, je passe ces derniers instants à chercher le but qui me poussera en avant cette fois ci. Je ne trouve comme image positive que le fait de franchir la ligne en brandissant le buf des Citadelles. Un peu maigre pour aller au bout d'une aussi longue course…

















J'arrive tôt sur la ligne de départ où quatre pelés se battent en duel. J'y retrouve Philippe et je suis content de ne pas attaquer cette course seul. On verra bien jusqu'où l'on s'accompagnera.












Grosse émotion quelques minutes avant le départ : non pas provoquée par la musique d'Era mais par la vue de la tête d'une fille ornée du buf des Citadelles. Symbole d'une réussite personnelle peut-être, en tout cas je suis touché.

5h15, le départ est donné. On part sur un bon rythme, sans s'affoler. Footing jusqu'à Dourbies prévu.












On monte en lacets par la route pour étirer cet immense peloton. Je tente quelques photos du ballet des frontales, totalement ratées.
Je sens Philippe moins à l'aise que moi et le début de course nous sépare peu à peu. On quitte la route pour une large piste et je suis content de trouver enfin une montée en approchant de Sauclières. Dans le village, la rue est remplie de monde, ça crie, ça encourage, un grand sourire sur le visage je prends de face toute cette chaleur. Juste quelques gorgées à une bouteille et je repars. Sept minutes d'avance sur mon plan de marche prévu pour terminer en 10 heures.











On continue, toujours sur de larges pistes ou par une ancienne voie ferrée. Terrain ultra roulant comme je ne l'aime pas et les cailloux qui le parsèment commencent à m'échauffer la plante des pieds. J'ai bien peur de sentir une ampoule en formation.
J'attends que le vrai trail commence, en vain. Toujours des pistes où un 4x4 passerait tranquillement et les quelques montées ne valent pas mieux. Un ancien m'indique qu'en 2007 cette partie se faisait par de jolis sentiers où ça bouchonnait : conséquence, on a droit à des pistes chiantes à mourir.











Je suis de plus en plus écoeuré, je trouve les Templiers survendus, ces boulevards n'ont de trail que le nom. Mes pieds chauffent, les cuisses commencent à devenir douloureuses et la légende des Templiers s'effrite sous mes pas.













En approche du St Guiral, le soleil qui se lève nous offre de très belles couleurs. Malheureusement, les pistes qui s'élèvent vers le sommet sont toujours aussi larges.













































Comme d'hab, je mange et je bois régulièrement. J'effectue une pause pour ranger le coupe vent et remplacer buf et frontale par casquette et lunettes.
C'est tout près du sommet que les vrais sentiers commencent enfin, ce qui me permet de ne plus souffrir des échauffements sous les pieds.


















Pour la première fois, je frôle le sommet et sa croix que j'ai souvent vu en photos.



















Mais le plaisir de dure pas et l'on retrouve rapidement les mêmes pistes pénibles. 25 bornes de roulant c'est beaucoup trop pour moi et mes cuisses me le font bien sentir. Je trottine comme je peux et je commence à me faire dépasser par des dizaines et des dizaines de coureurs.
Je me dis que ce doit être leur course de l'année, qu'ils ont du la préparer longuement, alors que moi j'ai eu beaucoup de mal à récupérer du Grand Raid des Pyrénées, ce qui m'a empêché de m'entraîner correctement et m'a occasionné une tendinite au mollet, 17 jours avant le départ.





















On attaque bientôt la jolie descente vers Dourbies, mais le moral est entamé et le mal aux cuisses me freine. Le défilé des coureurs continue à coté de moi, je suis incapable d'aller plus vite.
Je commence à faire le tour de toutes les bonnes excuses qui justifieront mon abandon : j'ai déjà vécu deux superbes ultras cette année, l'Ultra Trans Aubrac rude et fort en émotion puis le GRP 75km très dur physiquement. Un de plus ne m'apportera rien, si ce n'est de nouvelles semaines de fatigue. Et j'ai passé deux jours debout à distribuer des dépliants pour les Citadelles, peut être pas l'idéal avant course.
































Après une nouvelle grosse montée, aux abords de Dourbies, Stéphanie, une copine, me double. Elle n' a pas apprécié non plus ce début de course, on se dit que c'est un beau coin, pour faire des sorties dynamiques d'une vingtaine de bornes, pas plus.
















Le mal aux cuisses ne passe pas, le ravito se fait attendre et je commence à avoir envie de coca et de salé. Je grignote d'ailleurs quelques Monacos en attendant la suite.














Et puis c'est l'arrivée à Dourbies, énorme : des gens partout qui applaudissent, qui crient notre prénom inscrit sur le dossard. C'est à nouveau le grand sourire, l'émotion qui me submerge.
A voir, le film de l'arrivée :














Je mange et je bois presque de tout : soupe , tartines de Roquefort, pates de fruits, arrosées de Coca et de Perrier. Je croise une connaissance du off de la Clape, je lui dis que je ne suis pas au top. Il me propose de repartir ensemble. Je ne le connais pas assez, je ne sais rien de son allure, je préfère continuer seul. Je parle aussi avec Stéphane, organisateur du Trail Blanch, qui semble peiner aussi.
Je m'apprête à quitter la salle quand j'ai le plaisir de voir arriver Francis. Je sais qu'il va être surpris, je suis d'habitude plus rapide que lui. On cause un peu, heureux de se retrouver. Il n'est pas super bien non plus. Je le laisse se ravitailler et je ressors pour attaquer la montée sur la crête du Suquet.









Le sentier est joli mais ça monte fort. Ne jamais oublier les vers du poète Raffarin :



" La route est droite mais la pente est raide ".









La chaleur, les efforts demandés pour grimper me rappellent les mauvais moments du GRP. Je croise plusieurs coureurs qui redescendent vers l'abandon et je commence à y penser sérieusement. Plus que la douleur aux cuisses, c'est la peur d'être à nouveau fatigué pendant des semaines qui me préoccupe et rien, vraiment rien, ne me motive à aller jusqu'au bout. Mais je me vois mal croiser des centaines de coureurs en redescendant vers Dourbies. Je poursuis donc, décidé à prendre le bus à Trèves si c'est possible ou au pire à Causse Bégon.









Au milieu de la montée, je m'arrête pour me rafraîchir à un point d'eau. C'est là que me rejoint Francis. Je lui explique mon manque d'envie et mon arrêt prochain. Il essaye de me convaincre de continuer, mais cette fatigue future ne m'incite pas à changer d'avis.












































On arrive ensuite dans une très belle partie à travers bois, piégeuse car parsemée de cailloux cachés sous les feuilles mortes. Je ne peux de toutes façons toujours pas aller trop vite. Et je n'oublie pas l'essentiel, faire de belles photos. Francis part devant, m'attend, je lui dis de faire sa course puisque je m'arrêterais à Trèves. Mais bon, on s'accompagne, on se prend en photo, et j'essaye de ne pas trop bouchonner les plus rapides que moi.



Running with the Devil.

























On sort du bois, le panorama est magnifique, mais aussi démoralisant quand on voit les causses qui nous attendent pour les gravir et les dévaler. En espérant qu'il y ait un point de rapatriement à Trèves…
















La descente vers Trèves est superbe et un bénévole nous apprend que Thomas Lorblanchet vient de remporter la course il y a quelques minutes. Respect.






















Peut être est ce l'effet des très beaux sentiers ombragés et sûrement la conséquence d'une cohabitation réussie avec Francis, le fait est que je retrouve le moral dans cette descente. Je me vois bien continuer avec lui jusqu'au bout si ça le tente aussi. Il souffre pour sa part des adducteurs et entre handicapés, on pourra s'encourager.











Le pont de Trèves ou le tournant de la course : Francis est ok pour faire la course ensemble, je passe sans chercher le bus abandon et on attaque la montée vers Causse Bégon. On verra là bas comment on sera…










On est rejoint par Gibus, un des nombreux Kikoureurs présents sur la course. C'est lui qui prend ces photos. On cause un peu, puis plus rapide il s'éloigne devant nous.







Francis et Gibus.









On commence à se poser des questions par rapport aux barrières horaires mais après une montée régulière où l'on trottine de temps en temps, on arrive au ravito avec environ 50 minutes d'avance. Grosse ambiance ici aussi. Je reprends le même menu qu'à Dourbies et je remplis ma sacoche avec quelques pates de fruits et du pain d'épice. Toujours pas vu un psy pour expliquer le fait que je préfère le ravito fourni à celui que je porte…
Je croise ici Franck82 qui se porte bien et Clovis34 qui a abandonné sur blessure.
Tous les pleins refaits, on repart dans la souffrance, les cuisses refroidies étant encore plus douloureuses.










Ca trottine toujours sur les pistes du Causse Bégon.






































Arrive la descente sur St Sulpice.Mon frère qui a fait le 40 km la veille m'a averti : descente piègeuse ici comme à Cantobre et rude montée en face de St Sulpice. Effectivement, le sentier ombragé est étroit et glissant. Mais enfin, au bout de 55km, je n'ai plus mal aux cuisses et j'effectue donc une belle descente, doublant quelques personnes et revenant sur Francis, content de me voir retrouver mes moyens.

























On traverse la route sous le pont, on longe l'église et ses vieilles pierres et on attaque l'énorme montée vers le causse.




























On retrouve le soleil et des paysages grandioses : un petit sentier au milieu des rochers nous amène aux abords d'immenses falaises. Magnifique.
















On aperçoit les coureurs de l'autre côté de l'abîme et la pause photo s'impose.

















On rejoint deux coureurs assis au bord du sentier qui monte toujours, très raide. L'un d'eux s'affaisse, en train de perdre connaissance. Son pote lui file de grandes baffes pour le faire revenir. Il ouvre un peu les yeux. Avec Francis, on leur donne quelques morceaux de sucre en espérant que ce sera utile et ne pouvant faire plus, on continue notre chemin.










Au milieu des bois, on passe le cap des 10 heures de course. Marrant, moi qui croyais pouvoir rallier l'arriver dans ce délai…







La montée se poursuit, personne ne fait de miracle, on va tous lentement. Ici ou là, des gars arrêtés au bord, qui mangent un bout, récupèrent ou attendent que passent les crampes.



















La montée terminée, on poursuit sur un beau passage en bordure de falaise. On aperçoit au loin, tout en bas, Cantobre. Pour la première fois de ma vie de trailer, je risque de prendre une barrière horaire en pleine figure. Faudra pas traîner dans la descente…









Mais comme annoncé, la descente est technique et même plus que ça. Des marches rocheuses imposent prudence et retenue. Ce qui occasionne quelques ralentissements dans le peloton qui descend en file indienne. Je garde un œil sur la montre, ça devrait passer.








Sur le chemin taillé sous la roche, la lumière de fin d'après midi dore tous les paysages.











On arrive finalement à temps à Cantobre, avec 25 minutes d'avance sur la barrière. Sauvés !
Perturbé par le récit de mon frère, je suis persuadé qu'il reste 12km à faire. Mais un coup d'œil sur le profil confirme bien qu'il ne reste "que" 8km. Encore une grosse pause où l'on se ravitaille bien, Roquefort et Coca à volonté avant de repartir.










Mais le parcours nous réserve encore quelques parties plutôt sévères. Quelques marches à escalader puis un sentier qui monte encore et toujours pour rejoindre le plateau du Roc Nantais.



























On y découvre aussi des parties magnifiques, comme ce petit sentier où l'on chemine sous la roche, à la lumière du soleil couchant.
















Un peu plus haut, nous rattrapons deux coureurs dont un complètement à la dérive, qui avance accroché au sac de son pote. Au delà du delà comme dirait Francis.

















Bizarrement, arrivés sur le plateau, plein de personnes se mettent à nouveau à courir. Pour nous ce sera marche ou petit trot, au maximum. On passe ensuite tout près du roc Nantais, on entend en contrebas Michel Hortala animer les arrivées. Ca commence à sentir bon.












La descente technique mais sans plus après celles qu'on a connues se passe bien, trop lente même puisque bloqués derrière quelques personnes. Arrivés en bas, on prend juste le temps de faire une photo des deux guerriers avant de se remettre à courir.
La nuit tombe mais il reste encore quelques spectateurs. Dans leurs bravos, dans leurs regards, je ressens de l'admiration pour ceux qui viennent d'en baver pendant des heures.
















Michel au micro égrène les secondes qui restent avant le cap des 13h. Aucune importance, on fait notre entrée dans le parc, c'est immense, les lumières, les applaudissements, le bonheur d'en terminer. Je prends la main de Francis, les bras levés on franchit ensemble la ligne , heureux !













Michel Hortala me reconnaît, je lis la surprise dans ses yeux. Petite interview, il s'étonne de me voir arriver si tard, moi qui suis parfois dans le haut du classement. Je m'explique, la fatigue du GRP, le presque abandon à Trèves et la belle course vécue avec Francis.
Le chrono annonce 13h00'29", ma montre indique 6814 kcal disparus pendant ces 72km et 3100m de dénivelé.














Francis vous dira dans son récit, Au delà du delà, que c'est grâce à moi qu'il a fini sa course…
Il ment, vous aurez bien compris que c'est grâce à lui que j'ai terminé la mienne.