lundi 31 août 2015

Grand Raid des Pyrénées 2015


Nota : les meilleures   photos ne sont pas là, réservées pour un article à venir dans Esprit Trail. Elles donneront lieu à une galerie, plus tard. 




Résumé

Après un début tout en gestion et la beauté des lacs sous le soleil du matin, j'ai commencé à éprouver quelques difficultés dans la montée sur Sencours. Le froid a peu à peu remplacé la chaleur, avant qu'une première averse vienne nous avertir de la suite. J'arrive au ravito fatigué, mais heureux que la montée au pic du Midi soit annulée. Je me ravitaille bien et descend euphorique sur Tournaboup. La chaleur est de retour et la montée sur Aygues Cluses devient très dure. Je m'accorde une longue pause à l'ombre, pour manger et somnoler un peu. Pendant que je poursuis difficilement vers la Hourquette Nère, le ciel commence à bien se charger et je ne m'attarde pas au col.
Au niveau des lacs le premier orage sérieux éclate. Eclair, une, deux secondes, la foudre est à six cent mètres. La pluie est forte, mais s'arrête assez vite. Accalmie, descente vers le lac de l'Oule, on se croit sauvés. Avec la fraicheur j'ai retrouvé l'appétit, tout va bien.
Peu avant le lac, la pluie reprend avec son lot d'éclairs. Dix minutes avant l'abri du ravito, c'est un déluge de pluie forte et froide. Je compte faire un arrêt rapide, repartir vite pour en finir au plus tôt. Mais la course est neutralisée ici, jusqu'à la fin de l'orage. Je vais passer là quarante cinq longues minutes, dont quinze aux toilettes, avec des bouffées de chaleur, ne sachant pas si je vais vomir. Dans la salle où nous sommes des dizaines entassés debout ce n'est pas mieux, les gens se refroidissent, d'autres ont des malaises. Et puis nous pouvons enfin repartir. Je me couvre bien pour attaquer la courte montée vers le col de Portet où je suis rejoint par Romain, arrivé juste après la fin de la neutralisation.
A partir de là on va effectuer une superbe descente commune, reprenant des dizaines de coureurs, le sourire jusqu'aux oreilles en croisant les spectateurs chaleureux d'Espiaube et d'ailleurs. Quelques vagues d'émotions après celles que j'ai déjà eu tout le long de la course.
A côté l'arrivée manque de folie et de chaleur, et le passage sur le car podium n'apporte rien. Mais l'essentiel était bien avant, durant ces longues heures passées sur les sentiers.

Des doutes, du bonheur, le soutien dont on se sait le sujet aidant à avancer, tout était là encore une fois pour retrouver la magie de l'ultra qui fait que l'on aime à se replonger régulièrement dans cette folie.






Quatre heures du matin, p'tit dej tranquille pris au café avec Romain.



Un petit échauffement pour moi dans les ruelles, avant de rejoindre les amis sur l'aire de départ. 

5h c'est le départ.





Départ vraiment tranquille pour moi, doublé par des dizaines de coureurs, et rejoint par Steve et Romain avec qui je vais rester un bon moment. On plaisante, on regarde les flots de coureurs nous doubler.



Jusqu'au col de Portet, un parcours raide mais sans grand intérêt, si ce n'est celui d'étaler le (trop) gros peloton. Je n'ai pas eu à faire à des bouchons, mais je n'ai quasiment jamais été seul.





 Col de Portet, tout va bien. J'ai déjà repris quelques coureurs sur les fortes pentes.




CP1 - Restaurant Merlans      22/08 07:46:15   747ème sur 1169 coureurs 
                       
Ce début de course, différent et plus long qu'en 2012 a déjà faussé mes prévisions.
 Arrêt très rapide  : pas envie de Coca, je bois de l'eau gazeuse, mange un bout de fromage et de jambon, en prend dans ma pochette pour la suite, et en avant.









 Passé Merlans, la vraie course commence, la belle, dans la montagne. Le soleil éclaire peu à peu les sommets, les lacs, et ce secteur est toujours aussi magnifique.









Je m'arrête remplir mon bidon au refuge de Bastan, déçu par le sentier qui y mène : de sauvage et technique, il a été creusé et élargi pour devenir une autoroute.
Heureusement la suite vers le col de Bastanet est restée sauvage. Une belle montée pour moi, toujours en gestion et en forme.














Les lacs s'enchainent, superbes. Je m'arrête à nouveau au refuge de Campana remplir mon bidon. Aujourd'hui c'est course à l'eau claire, pure dans un bidon, juste sucrée dans l'autre.





Au pays des cailloux, vers le lac de Grézioles.







Passé le début de la descente vers Artigues, on bifurque vers la nouvelle partie. Il fait bien chaud maintenant, et je m'arrête enlever le manche longues.
Je redémarre avec Manu qui m'a aidé à enfiler mon maillot alors que je faisais des noeuds, et on va se côtoyer pendant un bon moment.





Ca sourit, tout va toujours bien.





L'arrivée sur la Mongie est top, avec beaucoup de spectateurs et une grosse ambiance. Le ravito l'est aussi, comme tous les autres.
Je prends une soupe, un peu de salé  avec de l'eau gazeuse, et refais le plein. Je renonce à aller aux toilettes, ne voulant pas perdre trop de temps à attendre une place. On verra dans la nature...









CP2 - La Mongie        22/08 11:10:56   559ème, quasiment 200 places gagnées






Dans la montée vers le col de Sencours, les choses se corsent. Tout d'abord il fait chaud, et je commence à peiner.




Puis le ciel s'assombrit, la température se rafraichit, et les premières gouttes commencent à tomber. Comme les autres je m'arrête pour me couvrir, rajoutant le manches longues.
Je choisis de garder le coupe-vent pour plus haut et plus froid, si la situation empire dans la montée du pic. Mais je suis à la limite de sortir les gants.










Au col de Sencours c'est doublement la fête : grâce au public présent et parce qu'en raison de la météo la montée au pic est annulée. Je ne regrette pas cet aller retour monotone sur piste, et vu mon état de fatigue actuel c'est un effort de moins à fournir.


Je suis donc euphorique et je profite pleinement du ravito avant d'attaquer la descente. Soupe à nouveau, eau gazeuse, etc.

 CP3 - Col de Sencours          22/08 13:12:17  389ème, 170 places gagnées








Rapidement on quitte la zone pluvieuse pour retrouver le soleil et la chaleur.  Une partie qui elle aussi est nouvelle, sur un sentier bien sympathique et qui a plus de charme que l'ancienne version.





A Tounaboup on retrouve à nouveau beaucoup de public, mais l'entrée sous la tente surchauffée est pénible. Un vrai sauna.

CP4 - Tournaboup Entrée      22/08 14:15:17   318ème, 70 places gagnées, mais sans le pic.




Ici il faut se refaire, je sais que la suite sera pénible. Un bol de pâtes, eau gazeuse toujours, jambon et fromage en réserve pour plus tard, et une compote pour finir. Mon arrêt n'est pas trop long, et je repars pour affronter la longue montée.

CP4 - Tournaboup Sortie       22/08 14:28:20                                  329ème, 11 places perdues


Au début ça va, si ce n'est un coureur à peine accompagné par celles que je suppose être sa femme et sa fille, avec des sacs bien chargés pour lui. Méthode très moyenne, et en plus elles n'arrêtent pas de parler.

La femme lui propose même de couper les lacets de la piste, ce qu'il ne fait heureusement pas. C'en est trop, je me retourne et je leur dis que si ça peut les aider le chemin est là, en leur montrant une rubalise. Puis je trace, énervé.





Plus haut la chaleur est de retour, et je suis dans une nouvelle sale passe. J'avance, je me rafraichis aux ruisseaux dès que je peux et évidemment j'ai un peu de mal à manger.
Je progresse lentement, pas très bien, et je finis par me décider à m'arrêter à l'ombre de quelques arbres, éloigné du sentier. C'est aussi par là que je me décide à adopter un bâton, pas pour l'aide à l'effort mais pour soulager une petite douleur qui dure sous un genou. Il m'accompagnera jusqu'au retour en ville.

Ici pas d'attente pour les toilettes, il était temps que je m'en préoccupe.
Puis je mange un petit peu, et je m'accorde dix minutes à somnoler.
Quasiment une demi-heure d'arrêt, mais j'en repars en meilleure forme.



J'arrive peu après à la cabane d'Aygues Cluses où je refais le plein de mes deux bidons, en eau pure. Je n'ai plus envie d'eau sucrée.






Il fait encore chaud et soleil, et je dois m'arrêter quelques minutes à l'ombre d'un rocher pour me reposer. Mais le ciel commence à tourner au noir et il semble que l’orage annoncé soit en approche.




Encore un effort et je parviens enfin au col.

CP5 - Hourquette Nère          22/08 17:22:10   437ème, 100 places perdues...






Je ne m'attarde pas et je me lance dans la descente.

Je m'accorde le droit de manger le Mini Mars, récompense prévue pour avoir atteint ce passage.

Puis l'orage commence à gronder, la température à baisser, et les premières gouttes à tomber. Le temps d'enfiler la seconde couche puis le coupe-vent, la pluie est là.
Il tonne, pas très loin, et j'avance toujours, faisant attention aux appuis devenus glissants sur les rochers.
L'avantage de ce rafraichissement c'est que j'ai à nouveau retrouvé l'appétit.







L'orage passe, la pluie s'arrête et la descente technique sur l'Oule se passe bien. Je perds des places, mais je m'en fous.





A l'approche du lac, la pluie reprend de plus belle. Je m'arrête boire un peu d'eau gazeuse auprès d'un petit ravito, semi officiel.

Puis c'est la dernière montée vers Merlans, sous une grosse averse, qui s’amplifie encore à l'approche du ravito.




CP6 - Restaurant Merlans      22/08 19:29:05   492ème, encore des places perdues dans la descente
 

Tant qu'à être mouillé, je compte faire un ravito rapide et repartir sous la pluie, pour en finir au plus tôt. Mais le responsable nous informe qu'il est interdit de repartir jusqu'à la fin de l’orage.
Je prends une soupe, une deuxième, perdant ma place assise, et les minutes commencent à devenir très longues. Impossible de trouver un endroit où se poser, ni même s'appuyer.
Effet supposé de la soupe, alors que j'étais très bien je commence à avoir des bouffées de chaleur. J'ai le visage en sueur, j'ai peur d'avoir un malaise. Je me réfugie aux toilettes, prêt à vomir, m'aspergeant la figure d'eau fraîche.
Je trouve un wc libre, et assis je vais passer là au moins dix minutes, retrouvant peu à peu un état normal.


J'en ressors pour rejoindre la salle où les coureurs continuent à arriver et à s'entasser. Ceux partis sans seconde couche (étrange autorisation de l'orga), s'habillent comme ils peuvent avec leur couverture de survie.

Un gars tombe raide en arrière, chute heureusement amortie par des coureurs assis. Les secours le prennent aussitôt en charge. Ca tourne à la cour des miracles.

Et puis, après quarante cinq longues minutes bloqué là, l'autorisation est enfin donnée de repartir.



Je perds cinq bonnes minutes de plus pour m'habiller chaudement, car sur chaque édition je redoute cette sortie de Merlans. Et en effet, ça ne manque pas, je grelotte dès que je sors, j'en suis presque à claquer des dents.
Mais avec l'effort fourni pour monter vers le col de Portet, je me réchauffe vite.





Et c'est un peu en dessous du col que je suis rejoins par Romain qui a fait un arrêt express au ravito, sans être bloqué par l'orage. Derrière nous, vers 18h, les coureurs ont été stoppés à Aygues Cluses et renvoyés à Tournaboup en raison des orages. Course terminée prématurément pour eux, et retour en bus.



Pour Romain et moi, c'est la fête. Il ne pleut plus, on est à peu près en forme et on va effectuer une très belle descente. D'abord sur les pistes de ski bien raides qui ne nous posent pas de problème jusqu'à Espiaube. La nuit tombe et on sort les frontales, avant d'être acclamés par plusieurs petits groupes qui a chaque croisement de route mettent une folle ambiance, et quelques presque larmes dans nos yeux.

Sur  la longue piste plate, on alterne marche et trot, car je ne veux pas m'épuiser trop tôt et je prends le temps de grignoter quelques trucs.

Et puis on arrive dans la fameuse petite forêt où je n'ai jamais couru. Pas envie en 2012, trop épuisé en 2014, cette année est la bonne. Le sol est détrempé, boueux, tout le monde marche avec attention, sauf nous qui fonçons, absolument confiants dans l'adhérence des Ultra Raptor.
Et à partir de là on ne va plus s'arrêter, dans les bois, les pistes, sur le chemin empierré et bien glissant, partout on court et on dépasse des dizaines de coureurs/marcheurs. Quel moment, quel plaisir...



Puis la descente s'achève, après quelques glissades mais aucune chute, et nous voilà dans les rues de Vignec. On passe encore quelques personnes je crois, puis sur le dernier kilomètre on adopte le rythme de ceux qui nous précédent. On ne va pas sprinter maintenant.

Encore quelques vagues d'émotion en croisant des spectateurs dans les premières rues du village, puis pas grand chose en arrivant main dans la main avec Romain, le public n'est pas déchainé. Pas grave, j'ai eu ma dose de bonheur anticipé plusieurs fois durant la course, seul ou bien lors de cette belle dernière descente.

L'arche passée, il faut patienter un peu pour monter sur le car podium, chercher tshirt et médaille. Un passage qui n'apporte rien, et même moins chaleureux que l'ancienne arrivée.
Le tshirt finisher est malheureusement très banal, avec l'éternel logo vert et quelques lettres bâtons. Ca reste des détails, mais ce n'est pas un visuel que je porterai souvent.

Arrivée - Vielle-Aure 22/08 22:33:33   552ème
Plus de 60 places perdues, dans l'arrêt à Merlans beaucoup plus, ensuite reprises en partie dans la descente

L'après course se passe bien, je mange et bois un peu, pas de coup de mou, pas de vomito, ça va. Je ne m'attarde pas et file me doucher et me reposer.

Extinction des feux  après une course mémorable qui m'aura vu passer par toutes sortes d'états, au gré des changements capricieux du ciel.
Mais quand la volonté est là, quand on se sait suivi et encouragé, tout se passe au mieux et l'on arrive à surmonter les moments difficiles pour aller chercher la ligne d'arrivée.

Le chrono en 17h33 reste anecdotique, et faussé par les trois heures de pénalité du pic à y rajouter, sans en retirer les quarante cinq minutes passé bloqué à Merlans. J'étais loin d'être prêt pour réussir un seize heures et encore moins un quinze, sur un parcours plus long que celui connu en 2012.

En tous cas ce fut une très belle aventure, et même s'il y a des moments difficiles à surmonter ça reste toujours un énorme plaisir de courir ce genre d'épreuve.

Rendez-vous pour la prochaine, je ne sais ni où ni quand.






Matos et autres détails :
La Sportiva Ultra Raptor aux pieds, des ventouses
Eau pure, eau sucrée, eau gazeuse, et j'ai bien avancé
Barre miel sésame, pâte d'amande Gerblé
Pâtes de fruit Isostar
Mini Mars !
Pain, jambon et fromage pris sur les ravitos toujours au top ici
Soupe, pâtes et compote
Matos obligatoire
Un gros mental



Ça aurait fait un beau tshirt finisher, non ?


8 commentaires:

Steve a dit…

BRAVO Michel. Super récit comme d'habitude. Je vois qu'on est passé par les mêmes états de fatigue après Tournaboup dues à la chaleur.
Super que tu sois finisher avec une fin avec l'ami Romain.
A bientôt je ne sais où ni quand mon ami.

Yvan a dit…

Bravo et merci pour le récit et les photos !
Encore une belle aventure vécue sur cette édition du GRP.
Juste une remarque : c'est un peu contradictoire de se plaindre du trop grand nombre de participants et dans le même temps de se réjouir du nombreux public présent aux ravitos. En effet, le public est souvent constitué d'accompagnants de coureurs (et rarement de locaux), et donc , moins de coureurs, moins de public aussi...

Thierry a dit…

Une belle lecture avant de débuter la journée.
Bravo pour ta course. à bientôt

Francis a dit…

Encore et toujours épique ce GRP et toujours aussi transcendant : ne rien lâcher quand tout va mal et profiter quand tout va bien. ...Un grand bravo pour être aller au bout et finir main dans la main ce genre de défi est toujours un grand bonheur.

Anonyme a dit…

Merci encore Michel pour ce récit. On pourrait être étonné qu'après être finisher du 120km, tu puisses encore ressentir de l'émotion en course sur ce 80. Il s'agit là je pense le récit d'une "bonne personne". Au plaisir de te croiser au détour d'un chemin.
Laurent le bordelais

Christophe a dit…

Encore une belle aventure. Fais nous en vivre de nombreuses encore!

Anonyme a dit…

Ah je l'attendais avec impatience ce récit et c'est toujours avec autant de plaisir que je découvre cette belle aventure que je ne pense pas avoir la possibilité de faire un jour..Les photos et les propos que tu fais partager en sont d'autant plus précieux.
Hourra pour toi et Romain...Arriver avec un vrai pote amène encore plus de sensationnel dans la boîte aux souvenirs.
@ très vite aux Cascades
Seb del pueblo de rieucross

grumlie a dit…

Merci pour ce grand moment partagé lors de cette mémorable descente. Comme souvent on a eu le droit à un peu tous les états d'âme ou de forme et passer la ligne a forcément un gout particulier et unique.
A bientôt pour d'autres aventures ;-)